El Bola

Espagne (2000)

Genre : Comédie dramatique

Écriture cinématographique : Fiction

Archives CAC, Collège au cinéma 2006-2007

Synopsis

El Bola a 12 ans, son regard a la dureté d’un adolescent qui a grandi trop vite. L’arrivée d’un nouvel élève dans sa classe, Alfredo, lui permet d’ouvrir les yeux sur un monde différent. Issu d’un milieu traditionnel et fermé, il découvre avec son ami une famille plus tolérante que la sienne. Les deux adolescents deviennent inséparables et Pablo trouvera dans cette amitié le courage d’affronter sa propre situation: une vie marquée par les mauvais traitements et le manque de communication.

Générique

Réalisation et scénario : Achero Mañas
Image : Juan Carlos Gomez
Son : Goldstein&Steinberg
Montage : Nacho Ruiz Capillas
Décor : Satur Idarreta
Costume : Mar Bardavio
Musique : Eduardo Arbide
Format : 35 mm, scope couleur
Production : Telesa P.C. avec la participation de la Télévision espagnole (TVE) et de Canal + Espagne
Distribution : Les films du Safran
Durée : 1 h 28
Interprétation
Pablo dit « El Bola » / Juan José Ballesta
Alfredo / Pablo Galan
José, le père d’Alfredo / Alberto Jimenez
Mariano le père d’El Bola / Manuel Moron
L’assistante sociale / Ana Wagener
Marisa, la mère d’Alfredo / Nieve de Medina
Aurora, la mère d’El Bola / Gloria Munos

Autour du film

Toute l’habileté du film d’Achero Mañas est d’avoir choisi, afin d’éviter tout didactisme ou sensationnalisme, de montrer le drame d’El Bola de l’extérieur, en ne nous révélant que progressivement son terrible secret. Dans El Bola, on peut dire que le drame préexiste au film et que la mise en scène va en quelque sorte s’en faire le révélateur, se contentant de lever progressivement le voile en distribuant un certain nombre d’éléments de signification dans le récit, créant par là un véritable suspense ou hors-champ.

Un travail intéressant avec les élèves pourrait donc consister dans le repérage, la discussion et, d’un point de vue plus cinématographique, dans l’analyse formelle (type de plans utilisés, découpage, éclairage, montage, etc.) de tous les indices dispersés au cours du film qui pointent et finissent par éclairer le drame caché vécu par El Bola. Toucher du doigt un aspect apparemment anodin de la psychologie des personnages ou des dialogues, isoler un détail d’un plan, découper les éléments de signification dans une séquence déterminée, peuvent constituer des exercices actifs de compréhension et de déchiffrement du texte filmique qui, pour irréductible qu’il soit à une seule interprétation, ne se prête pas moins à une ou plusieurs lectures en fonction du thème choisi. On peut par exemple évoquer certaines scènes ou détails particulièrement significatifs du point de vue de la violence implicite contenue dans le film: le lettrage déchiré et le trem blé du générique, la scène d’ouverture et le jeu des enfants sur les rails, la symbolique du tatouage, la scène de l’hôpital où le parrain d’Alfredo est interné, les regards d’El Bola dans plusieurs scènes et notamment celle avec la cliente du magasin, certains détails vestimentaires ou d’ameublement de la famille d’El Bola…

Raoul Rodriguez et Loïc Diaz Ronda / Dossier Lycéens au cinéma

« … C’est l’histoire d’une famille qui incarne l’espoir et l’illusion d’un enfant face à l’angoisse et à la peur qu’il vit habituellement chez lui. El Bola, c’est la fascination et la joie de quelque chose de différent et de nouveau face à la tristesse et à l’horreur du routinier et du vieux. El Bola, c’est la communication face au silence, la défense d’idées nouvelles et ouvertes face à d’autres, vieilles et périmées qui aujourd’hui encore prétendent être inamovibles. El Bola, c’est la lutte de la liberté face à la répression. El Bola, c’est la douleur physique qui ne dure pas, produite volontairement par une aiguille qui pénètre la peau pour dessiner un tatouage face à la douleur physique due à la violence cruelle et brutale d’un père qui restera indélébile à jamais. El Bola, c’est la fatalité et l’autodestruction d’une génération face à l’ignorance et le vide de l’autre.

El Bola raconte tout cela du point de vue d’un enfant. Mais par dessus tout, El Bola est l’histoire d’un échec et d’un paradoxe. L’échec de notre société car les institutions, malgré les efforts réalisés pour résoudre ce type de situation, sont incapables de sauver la vie de ces enfants. Et un paradoxe car l’espoir que suscite l’apparition de la famille, au lieu d’améliorer les choses, accélère les évènements en produisant l’effet contraire. El Bola est, enfin, l’histoire d’un enfant qui découvre et prend conscience de l’existence d’une vie différente. Cette découverte fait qu’il se rebelle à l’idée de revenir à sa vie antérieure.

Concernant la mise en scène et la réalisation, les deux se faisaient toujours en fonction de l’interprétation et de la mise en scène. A aucun moment, les acteurs n’ont été au service des mouvements de caméra ou de la lumière ou de tout autre paramètre qui aurait pu, de quelque manière que ce soit, rendre leur travail plus difficile. Les scènes avaient été répétées avant le début du tournage. Ce travail a eu lieu, à chaque fois que les conditions l’ont permis, dans les décors mêmes du tournage. Nous avons essayé le plus possible de suivre l’ordre chronologique de l’histoire, pour aider les acteurs, et surtout les enfants, à maintenir un rythme et une continuité dramatique indispensable à un film où le plus important est, avant tout, la conviction d’interprétation.

Pour moi, la caméra devait fonctionner comme témoin oculaire, sans prendre d’autres initiatives que de suivre les évènements dramatiques, de manière naturelle, au prix, parfois, de mouvements brusques, étranges et peu orthodoxes. De cette façon avec un travail basé sur l’interprétation, on a cherché un réalisme le plus proche possible du documentaire, de façon à ce que tout paraisse arriver spontanément.

J’aimerais aussi parler du choix des acteurs tout comme de la direction artistique et du traitement de la photographie. Le choix des acteurs est une part importante, qui doit toujours être faite très soigneusement. On a cherché les personnages des mineurs dans la rue, dans des collèges publics et dans des centres d’assistance de la Communauté de Madrid, comme je l’avais fait pour mes précédents films. On a choisi des gamins, sans aucune, ou avec très peu d’expérience professionnelle et dont l’aspect et le comportement se rapprochaient du personnage qu‘ils devaient interpréter. Ainsi j’espérais obtenir dès le début une vraisemblance dans les personnages et la possibilité d’arriver à une spontanéité dans l’interprétation qui contribueraient ostensiblement au développement de l’histoire ce que j’aurais difficilement obtenu avec des enfants expérimentés. Le travail a été très lent et coûteux mais je suis sûr que l’effort ajouté se reflète dans le résultat.

Pour interpréter les personnages adultes, nous avons choisi des acteurs professionnels mais pas trop connus. D’un côté, avec leurs expériences, ils allaient aider les plus jeunes comédiens inexpérimentés, et d’un autre coté, leur anonymat leur a permis de ne pas porter le poids d’une image qui aurait pu leur enlever l’authenticité que je considérais indispensable pour la vraisemblance de tous, et de chacun des personnages.

Quant à la direction artistique, nous avons été très rigoureux pendant les repérages, cherchant des cadres réels tant pour les extérieurs que pour les intérieurs. L’idée était d’obtenir ce climat et cette qualité que possèdent uniquement les lieux déjà habités, les modifiant seulement lors d’occasions très particulières quand quelques éléments pouvaient être contradictoires avec la cohérence des personnages et de l’histoire. Ce travail s’est fait postérieurement au choix des comédiens et en fonction de leurs caractéristiques personnelles, on cherchait tel ou tel endroit. Ainsi la relation comédien-espace s’est établie très rapidement et facilement.

Le traitement de l’image a été assujetti, comme tout le reste, à l’interprétation des acteurs. C’est à dire qu’à tout moment, la caméra devait chercher les comédiens, et non l’inverse. On a essayé de faire une photographie toujours réaliste, sans aucune  » préciosité  » qui aurait pu ôter la simplicité, la fraîcheur et l’authenticité des scènes. À plusieurs moments le flou a été utilisé comme une arme documentaire, et on cherchait un format qui permettait de voir le grain à l’écran. En utilisant tous ces éléments et une mise en scène basée, comme je l’ai dit, sur l’interprétation des comédiens, on prétendait obtenir un film cru, vrai et réaliste, dans lequel la base et l’intérêt se trouvent dans l’argument même de l’histoire et non pas dans un quelconque effet ou virtuosité technique. »

Achero Manas / Dossier de presse

Pistes de travail

  • La violence
  • La famille
  • La maltraitance
  • La mort