Dernier Combat (Le)

France (1983)

Genre : Science-fiction

Écriture cinématographique : Fiction

Archives LAAC, Lycéens et apprentis au cinéma 2000-2001

Synopsis

Tout a été détruit sur terre, ou presque. Le vent et la tempête ont soufflé ce qu’il restait de civilisation. Un homme solitaire survit, au dernier étage d’une tour engloutie par les sables. Là, patiemment, au fond d’un bureau immense, il construit un avion de fortune pour partir. L’homme réussit à voler au dessus du désert. Derrière l’horizon, il découvre un groupe de survivants qui ont organisé leur existence sous les ordres d’un chef sanguinaire. Plus loin encore, un vieux médecin s’est réfugié dans les décombres d’une clinique, et se défend contre un homme violent qui essaie de forcer sa porte. Les quatre rescapés vont se combattre pour posséder le secret le mieux gardé : la dernière femme du monde.

Générique

Producteur d’origine : Les Films du loup
Distributeur d’origine : Gaumont Distribution
Détenteur des droits actuel : Les Films du Dauphin
Distributeur actuel : Gaumont
Réalisation : Luc Besson
Scénario : Luc Besson et Pierre Jolivet
Image : Carlo Varini
Son et mixage : Jean-Paul Loublier
Montage : Sophie Schmit
Décors : Christian Grosrichard, Thierry Flamand, Patrick Lebere
Effets sonores : André Naudin
Costumes : Martine Rapin, Marie Beau
Musique : Eric Serra
Interprétation :
L’homme solitaire / Pierre Jolivet
Le médecin / Jean Bouise
L’homme violent / Jean Reno
Le chef / Fritz Wepper
La femme / Christiane Krüger
Durée : 1H30
Sortie à Paris : 6 avril 1983

Autour du film

Pour son premier long métrage, Luc Besson a choisi des options formelles allant à l’inverse de la production courante du début des années 80. Scope, noir et blanc, sans paroles, Le Dernier combat est conçu comme un objet à part, mais les choix du réalisateur sont ici ambigus. Le noir et blanc s’explique parfaitement pour des raisons esthétiques (l’atmosphère obscure du film) et économiques (difficultés financières rencontrées lors de la conception). Mais peu de scènes justifient réellement l’emploi du Scope. Ce choix relèverait plus du “ marketing ”. Allié au noir et blanc, ce format témoigne en effet d’un fort pouvoir de convocation cinéphilique (Lola de Jacques Demy ou Huit et demi de Federico Fellini pour ne citer que deux œuvres marquantes de l’histoire du cinéma). Il s’agit pour ce jeune réalisateur de se démarquer des autres premières œuvres pour conquérir le public et surtout les professionnels (notamment les distributeurs).
Le Dernier Combat est une fiction passablement opaque qui s’épuise parfois dans sa durée. Le spectateur est souvent en manque d’informations quant aux situations et aux personnages. Si nous acceptons aisément d’ignorer l’origine du cataclysme, il subsiste d’autres interrogations dont l’absence de résolution enraye notre participation au film : d’où viennent les personnages ? qui sont ces hommes dans le cimetière de voitures ? pourquoi Jean Réno attaque-t-il Jolivet ?… Autant d’énigmes qui dans un court métrage contribueraient à créer une atmosphère étrange mais qui dans un long métrage doivent être étayées pour ne pas dérouter le spectateur et perdre son adhésion.

Autres points de vue

Luc Besson aime la bande-dessinée et visiblement, il n’ignore rien du récent cinéma d’anticipation qui s’est attaché à imaginer les conditions de survie de l’espèce humaine à la suite de catastrophes nucléaires. Le Dernier Combat est né, sans doute, de la vision de films du type Escape from New York, de John Carpenter, ou des Mad Max australiens. […] Nous ne saurons jamais à quelle catastrophe ont survécu les malheureux que Luc Besson met en scène, occupés, comme les pittoresques mutants du Bed Sitting Room de Richard Lester, à recréer les conditions d’une vie matérielle acceptable à l’aide des débris d’une ancienne civilisation qu’ils récupèrent tant bien que mal, ou s’opposant en de féroces rivalités de clans dont l’enjeu nous demeure mystérieux jusqu’à la dernière image.
On ne nous expose pas non plus la raison pour laquelle ces rescapés ont perdu l’usage de la parole. Il aurait fallu échafauder une brève théorie sur la nature du traumatisme subi, impliquant qu’on nous fournisse des données quant à la catastrophe mise en cause. Luc Besson s’en garde et on ne lui en fait pas le reproche, parce que son parti pris de silence est extrêmement agréable à l’oreille. Aussi agréable que sa décision de filmer en Cinémascope noir et blanc. Luc Besson est de ces cinéastes qui savent créer un monde avec rien, filmer des décors modestes de façon à nous les faire paraître riches et qui possèdent le don devenu rare qui est celui de conter. Par-dessus le marché, il lui arrive de faire pleuvoir des trouvailles en forme de gags poétiques (et il s’agit bien de pleuvoir, allez vérifier vous-mêmes), et jamais nous ne le voyons se départir d’un sens de l’humour très juvénile qui nous ramène aux temps estudiantins où l’on savait monter des canulars de haute qualité. De toute évidence, Luc Besson est un cinéaste qui nous donnera très bientôt de ses nouvelles.
Michel Pérez, Le Matin de Paris, 12 avril 1983

Pistes de travail

La frontière entre Anticipation et Science-fiction est très mobile. Dans le cinéma d’Anticipation, le réalisateur propose une critique politique du présent, de notre société en se projetant dans le futur. Il anticipe donc sur les événements, l’environnement, le pouvoir, les comportements et la mode. La scénarisation de l’Anticipation touche à la prospective.
Pour la S.F, l’auteur (cinéaste ou écrivain) fait de même mais ouvre sur un autre monde en ajoutant une dimension surnaturelle, fantastique voire merveilleuse.
Dans cette double perspective, on s’interrogera sur le regard que porte les films suivants sur le monde contemporain qui les a suscité : que l’on revienne au Métropolis de Fritz Lang (1927) et à la montée du nazisme, ou plus près de nous à La Jetée de Chris Marker (1962) ou encore aux films qui ont dû marquer l’imaginaire de Besson : La Planète des singes, Franklin J. Schaffner (1967), L’Âge de cristal, Michael Anderson (1975), Mad Max, George Miller, La Guerre des étoiles, Georges Lucas (1977) et Blade Runner, Ridley Scott (1981).

Fiche mise à jour le 5 octobre 2004

Expériences

Le Dernier Combat est un avatar du court métrage réalisé et coécrit avec Pierre Jolivet en 1981: L’Avant-dernier. Le sujet et la forme (emplois du Scope et du noir et blanc) sont identiques de même que la présence de certains comédiens (Pierre Jolivet et Jean Réno). Ce court servira de maquette pour trouver, non sans difficultés, les financements du long. Devant les refus institutionnels, Besson obtiendra des capitaux privés. Les deux prix remportés à Avoriaz et le succès critique du Dernier Combat lui assurent la confiance et la considération d’une profession qui n’avait pas cru en son projet. L’année suivante, il rencontre Isabelle Adjani et tourne le clip de sa chanson Pull marine. Le soutient de la comédienne l’aidera à tourner Subway. A partir du Grand Bleu, ses films témoignent d’une véritable adéquation avec les attentes du public adolescent.

Place dans le courant

Le Dernier Combat est un film profondément ancré dans son époque. S’il n’en donne pas une lecture directe, il témoigne de thèmes, d’élements, de comportements qui offrent une vision significative et exemplaire sur une certaine tendance cinématographique. Au début des années 80, une nouvelle esthétique venue de la publicité vient contaminer le cinéma. Elle pose le primat de l’individu sur le groupe, l’utilisation de stéréotypes, et l’emploi de personnages archétypaux. Diva de Jean-Jacques Beineix (1981) et Subway de Luc Besson (1984) participent de cette tendance. Ces œuvres présentent des êtres souvent désincarnés, énigmatiques, décalés ou caricaturaux, meurtris par leurs passions ou leurs désirs… Ils évoluent dans des univers assez froids, incongrus, new age, peuplés de motifs et de décors baroques.
Ces éléments de mise en scène vont paradoxalement à l’encontre d’une modernité ; ils penchent davantage vers le modernisme. En tentant de coller au plus près à une époque, ils s’en éloignent d’autant et sont victimes d’un vieillissement prématuré.

Auteur du dossier : Alain Keit

Outils

Bibliographie

L'histoire du dernier combat, Luc Besson, Pierre Bordas &Fils, 1999.
L'Ecran post-moderne : un cinéma de l'allusion et du feu d'artifice, Laurent Jullier, Ed. L'Harmattan, 1997.
Le cinéma français. Tome 2. De baisers volés à Cyrano de Bergerac 1968-1990, Jacques Siclier, Ed. ramsay Cinéma, 1991.
L'Age moderne du cinéma français. De la Nouvelle Vague à nos jours., Jean-Michel Frodon, Ed. Flammarion, 1995.
L'Exercice a été profitable, Monsieur, Serge Daney, Ed. P.O.L, 1993.
Le cinéma français contemporain, René Prédal, 1984.

Web

Site officiel de Luc Besson www.luc-besson.com