Demoiselles de Rochefort (Les)

France (1966)

Genre : Comédie musicale

Écriture cinématographique : Fiction

École et cinéma 2009-2010, Lycéens et apprentis au cinéma 2010-2011

Synopsis

Une caravane de forains arrive à Rochefort pour la Fête de la mer. Les forains s’installent sur la Place Carrée devant l’hôtel de Ville. Deux jumelles, les soeurs Garnier, donnent des cours de danse à des petites filles. Elles rêvent du grand amour. Leur mère, Yvonne, gère la café de la place.
Elle a jadis renoncé à aimer Simon Dame parce qu’elle trouvait son nom ridicule. Celui-ci est devenu marchand de musique à Rochefort, mais Yvonne l’ignore. Le café est fréquenté par le marin Maxence, par un vieux maniaque Subtil Dutrouz et par les deux jeunes patrons des forains, Etienne et Bill, qui viennent d’arriver.
Etienne et Bill décident d’engager les soeurs Garnier afin qu’elles remplacent deux danseuses défaillantes lors de la kermesse du lendemain. A la sortie de l’école, alors qu’elle est allée chercher son petit frère Boubou, Solange fait la rencontre d’Andy Miller, vieil ami de monsieur Dame. C’est le coup de foudre instantané.
La kermesse se déroule le lendemain, un dimanche. Après la fête, Solange retrouve Andy dans la magasin de musique et sa mère Yvonne retrouve, de son côté, Simon Dame. Sur la route du départ, Delphine va rencontrer Maxence qui fait de l’auto-stop pour aller vers Paris.

Générique

Réalisation : Jacques Demy
Scénario et dialogues : Jacques Demy
Assistants réalisateurs : Michel Romanoff, Alain Franchet, Jacques Baratier, Claude Miller, Bernard Gilson
Image : Ghislain Cloquet
Décors : Bernard Evein
Son : Jacques Maumont
Montage : Jean Hamon
Chorégraphie : Norman Maen
Musique : Michel Legrand
Interprétation :
Delphine Garnier : Catherine Deneuve
Solange Garnier : Françoise Dorléac
Etienne : George Chakiris
Simon Dame : Michel Piccoli
Andy Miller : Gene Kelly
Yvonne Garnier : Danielle Darrieux
Maxence : Jacques Perrin
Bill : Grover Dale
Guillaume Lancien : Jacques Riberolles
Durée : 120 min.
Sortie à Paris : 8 mars 1967
Prix Max Ophuls 1967

Autour du film

Les Demoiselles de Rochefort repose sur un paradoxe : réaliser en France une comédie musicale à l’américaine à grand spectacle avec chansons et ballets, mais la filmer dans une vraie ville, en décors naturels, sur la place de Rochefort. En ce sens, le film respecte l’optique « réaliste » de l’esthétique de la Nouvelle Vague qui entend privilégier la vérité des lieux, en référence au credo néo-réaliste des films italiens de l’après-guerre.
Le choix de la ville militaire de Rochefort offre au cinéaste le géométrisme accentué de son architecture. Les dallages réguliers de la Place Carrée se prêtent à la représentation des figures chorégraphiques qui se détachent ainsi sur un fond symétrique. Le sol de Rochefort offre l’équivalent des structures visuelles des ballets kaléidoscopiques de Busby Berkeley, le célèbre réalisateur et chorégraphe américain des Chercheuses d’or (1935) et de Place au rythme (1939).

Les chansons et les moments de danse jouent un rôle de premier plan dans cette stylisation du réel. Mais les paroles de celles-ci sont des prolongements directs des dialogues. Le film joue sur une distribution asymétrique des séquences dansées, chantées et dialoguées. Le chant n’est pas toujours au service du lyrisme amoureux, comme en témoigne la séquence de fait divers au cours de laquelle on découvre le corps découpé en morceaux d’une ancienne danseuse des Folies Bergère, Lola-Lola.

Vidéos

La chanson de Delphine

Catégorie :

À la 32e minute des Demoiselles de Rochefort, les deux sœurs sont à nouveau réunies chez elles, comme lors de leur première apparition avec la chanson des jumelles. Mais contrairement à celle-ci, très découpée, cette scène joue avec le principe du plan-séquence, ou plutôt du plan-chanson, puisqu’il y a bien plusieurs plans dans la scène, mais un seul pour la chanson de Delphine.

Texte, voix et réalisation : Gaël Lépingle

Gloire de l’amateur

Catégorie :

Solange Garnier a les pieds sur terre et Dorléac sait admirablement danser ; Delphine Garnier au contraire vit son amour dans l’idéal, et Deneuve a beau incarner la professeur de danse, elle lève la jambe avec parcimonie. Cet écart creuse une différence essentielle : Dorléac est une professionnelle de la comédie musicale, à qui il revient d’être aimée de Gene Kelly, tandis que Deneuve en serait une sorte d’amateur, au sens le plus noble du terme. Avec elle, Les Demoiselles de Rochefort vont rendre la comédie musicale à la portée de tous.

Cette vidéo a été conçue en complémentarité avec la rubrique « Filiations », en page 17 du livret enseignant Lycéens et apprentis au cinéma.
Texte, voix et réalisation : Gaël Lépingle.

La couleur au cinéma

Catégorie :

Les films programmés dans les dispositifs français d’éducation au cinéma (École, Collège, Lycéens et apprentis au cinéma) peuvent aussi être abordés en suivant le fil rouge d’une question de cinéma transversale. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du Cinéma, cent ans de jeunesse où vous trouverez, en plus des ressources générales sur chaque question de cinéma (enjeux, une question/une séquence, extraits de films…) des ressources spécifiques sur les films des dispositifs, sous forme de PDF (liste des films des dispositifs concernés par une question de cinéma, exemples d’analyses, bibliographie).

Ainsi, Tomboy est-il un film exemplaire de la question « La couleur au cinéma ».

Logo-CCAJ-OK-

Pistes de travail

L’œuvre de Jacques Demy est construite sur le principe de la circularité. Les Demoiselles de Rochefort comprend de nombreux échos aux films antérieurs, notamment Lola et Les Parapluies de Cherbourg. Tous trois se situent dans un port : Cherbourg, Nantes et Rochefort. Delphine est un double de Geneviève, l’héroïne des Parapluies de Cherbourg (elles sont incarnées par la même actrice). Guy le garagiste malheureux (Nino Castelnuovo) devait être l’un des deux forains. L’ombre de Lola (Anouk Aimée) plane sur Les Parapluies comme sur Les Demoiselles. Roland Cassard, qui aimait Lola, réapparaît à Cherbourg pour épouser Geneviève. Subtil Dutrouz évoque la veuve Desnoyers dans Les Demoiselles. Il y a bien d’autres thèmes qui traversent toute l’œuvre.

Les Demoiselles de Rochefort est un hommage direct à la comédie musicale américaine. Le film bénéficie d’un budget conséquent et la présence de deux vedettes américaines Gene Kelly et Georges Chakiris renvoie directement à Un jour à New York (Donen et Kelly, 1949) pour l’un et à West Side Story (Robert Wise, 1961) pour l’autre. Mais c’est une comédie musicale en décors naturels dont les paroles des chansons ont autant d’importance que les dialogues du film.

Les Demoiselles de Rochefort se présente également comme un conte de fées avec deux princesses qui attendent leurs princes charmants respectifs. On peut alors comparer le film à Peau d’Ane.

Mise à jour: 16-06-04

Expériences

Jacques Demy est né à Pontchâteau en 1931, dans la région de Nantes. Son enfance est racontée par Agnès Varda dans Jacquot de Nantes d’après les souvenirs du cinéaste. Il suit les cours de l’Ecole Louis Lumière et s’intéresse d’abord au cinéma d’animation. Il devient ensuite l’assistant de Georges Rouquier qui produit son court métrage Le Sabotier du Val de Loire (1956). L’émergence de la Nouvelle Vague lui permet de réaliser son premier long métrage, Lola, produit par Georges de Beauregard en 1960. Après La Baie des Anges, il obtient les moyens de réaliser un mélodrame entièrement chanté et en couleurs, Les Parapluies de Cherbourg, film qui va avoir un immense succès international. Il enchaîne, toujours avec le concours musical de Michel Legrand, avec Les Demoiselles de Rochefort. C’est ensuite l’expérience américaine avec Model Shop (1969) qui prolonge les thèmes de Lola. Revenu en France, il adapte Peau d’âne (1970) où il retrouve Catherine Deneuve et Jacques Perrin sur une musique de Michel Legrand.

Les années 70 et 80 seront plus difficiles pour lui en raison de l’échec commercial de quelques films (Parking, par exemple). Il signe toutefois deux drames ou mélodrames musicaux dignes de ses premières œuvres : Une Chambre en ville (1982), peut-être son chef-d’œuvre et Trois place pour le 26 (1988), testament d’Yves Montand comme du cinéaste, qui meurt prématurément en 1990.

Outils

Bibliographie

Jacques Demy et les racines du rêve, Jean-Pierre Berthomé, Ed. l'Atalante, 1996.
Le cinéma enchanté de Jacques Demy,Camille Taboulay, Cahiers du cinéma, 1996.
Jacques Demy ou les racines du rêve, Michel Delahaye, Cahiers du cinéma n°189, 1967.

Cahier des Ailes du Désir n°4 - "J.Demy et les racines du rêve", par J.P.Berthomé et "Le cinéma enchanté de J.Demy", par Camille Taboulay.

Cinéma, une histoire de plans (Le) de Alain Bergala
Il était une fois... Les Parapluies de Cherbourg de Serge July,Marie Genin
André Téchiné, après la Nouvelle Vague de Laurent Perrin
Naissance de la Nouvelle Vague ou l'Evidence retrouvée de Claude-Jean Philippe